Institut de l'Enfant... le CIEN à Nancy
RENTREE DU LABORATOIRE DU CIEN DE NANCY
L'été Paralympiques. Spe 2024 été scandé par deux grands événements de corps, celui des Jeux Olympiques et celui des Jeuxctateurs en présences vivantes ou devant nos écrans, nous avons été plus ou moins ravis et captivés par la performance de ces corps multiples. Aucun entraînement ne garantit l'existence d'une performance à venir, car ce sont deux temporalités différentes. Il y a aux JO des ratages imprévus, comme des réussites imprévisibles. L'incertitude de l'acte sportif témoigne de ce non recouvrement entre préparation et réalisation singulière. La performance sportive de haut niveau requiert, aussi un engagement subjectif décidé. La formule de Spinoza : « on ne sait pas ce que peut un corps », c'est la « Paralympie » qui le démontre le mieux, car elle est le lieu de l'inclusion radicale de l'étrangeté des corps par la multiplicité de leurs réalisations singulières. Les performances des sportifs paralympiques échappent à notre entendement, ce qui ne les empêchent pas d'exister et de nous faire vibrer, à notre tour, ou de nous faire avoir quelques petits reculs devant ce que réalisent ces corps improbable
A tenir compte de ces existences inédites, ça pourrait faire tomber ou se déplacer en nous, quelque préjugés tenaces que nous maintenons parfois pour nous comme pour les autres, par retrait, empêchement, interdit, au lieu de laisser venir, d'ouvrir des interstices à ce qui pousse, se cherche, un élan, une cause... Chez les sportifs paralympiques cette cause est devenu irrépressible et irréductible, c'est devenue leur vie même, un « accroche-vie » spécifique à chacun, unique qui ne les empêche pas de réaliser ensemble malgré leurs catégorisations différentes par l'institution olympique. A l'impossible, nul n'est jamais tenu, sauf à risquer de le faire exister à partir de l'inconnaissable se confrontant à de l'inconnu en acte. Les sportifs paralympiques ont déjà fait la traversée, ils ont écranté l'imaginaire, ils sont « Ailleurs », ils y incarnent l'inattendu radical, l'invisible, l'imprévu, la bizarrerie, l'invention... à leur regard comme à ceux des autres. Ils réalisent leurs performances avec ce qu'ils peuvent. Ils osent aller caresser, en leur corps l'in-fini qui y gite, en ayant ouvert en eux, une absence qui les meut. Ils nous offrent une pratique de fraternité nouvelle, vivante et vibrante. Allons nous les suivre et poursuivre avec eux ?
Donnons nous rendez-vous, le jeudi 12 septembre 2024, à partir de 20 H 30 à la MJC Lillebonne, 14, rue du Cheval blanc, à Nancy. Nous continuerons à ouvrir nos yeux et nos oreilles à ce qui se fabrique dans les échanges familiaux, scolaires, ou institutionnels, entre enfants et adultes. Nous attraperons ces émergences inédites, nous en débattrons les pré-supposés, les partis-pris, à partir desquels chaque praticien « fait lecture » de sa pratique et la transmet.
Françoise Labridy, 4 septembre 2024
2e séance, le jeudi 3 octobre 2024, 20h30
Les enfants, rêvent, ils jouent, ils fantasment, ils racontent et se racontent des histoires, ils ne font pas que des choses utiles, mais ils s'inventent des mondes.
Soyons attentifs à ce qu'ils disent tout bas, en passant, à des détails imprévus, à leurs curiosités, à leurs bizarreries, acceptons de ne pas tout comprendre, mais de rebondir avec eux pour saisir ce qui s'échange et se construit entre adultes et enfants. Je me souviens d'un petit garçon de CE2, qui ne pouvait pas s'empêcher pendant les dictées de se précipiter vers la maîtresse, pour lui dire à l'oreille tout bas, ce qui s'évoquait en lui. Mais aussi de Souleimane Diamenka, qui à peu près au même âge disait faire des « attentats-poétiques » en sautant aux oreilles des passants pour leur susurrer un poème, ou cet autre plus jeune encore qui se précipitait vers d'autres enfants pour les mordiller et qui maintenant énonce non-non-non avant de faire la bévue et la remplacer par un éclat de rire.
Nous partagerons ce que vous aurez glanés les uns les autres, dans les situations que vous aurez rencontrés ou dans les textes que vous aurez lus
le jeudi 3 octobre 20h30 à la MJC Lillebonne, rue du Cheval blanc, NANCY.
Responsable du labo francoise.labridy@wanadoo.fr
3e séance : le jeudi 7 novembre 2024, 20h30
Voyage, voyage...
Des rêves aux fantasmes, et aller et retour, en passant par les jeux... Que disent enfants et adolescents aux adultes, des turbulences qui les traversent et les bouleversent ?
Vont-ils trouver des adultes à qui parler, quelques oreilles assez trouées pour entendre des mots, des signifiants singuliers qui les ont percutés.
Enfants et adultes ont à « se dépatouillez » avec la langue qu'ils ont reçus de leur famille et qui fait le socle de toutes les relations humaines.
Comme la langue, « les rêves nous tombent dessus, ils s'imposent, sont impossible à raconter, tout en étant intempestif et intangible, ce qui les rend encore plus avide d'être raconté », nous dit Valeria Sommer-Dupont, dans son article : quand le rêve crève l'écran, en s'appuyant sur un texte de Kafka. Elle fait apparaître la fonction pulsionnelle et signifiante du rêve quand celui-ci se transforme en cauchemar et que l'enfant se réveille en criant, la nuit, alors que les parents n'en font pas un motif de consultation. Elle relève pour l'enfant et à l'enfant l'invention signifiante qu'il produit : « il y a un marqueur-piqueur, qui fait des trous partout, sur le mur, dans la terre, sur la route, partout, partout. ». Un MARQUEUR-PIQUEUR, c'est ainsi qu'elle ouvrira la porte à l'enfant pour qu'il puisse venir déposer les étrangetés qui se battaient dans son corps sans pouvoir les arrêter. (Revue ECF, n° 104, Tu rêves encore ?, p. 131-134, Navarin, 2000.
Retrouvons nous le jeudi 7 novembre pour converser sur d'autres trouvailles, les vôtres, glanées dans vos lectures, dans des situations pratiques, des petits moments essentiels d'une prise en charge, et aussi dans les transformations incessantes d'un monde qui imposent de nouvelles normes à nos vies.
20 h 30, MJC Lillebonne, rue du cheval Blanc, Nancy
Ouvrir au réel dans les échanges quotidiens de nos mots
Comment les enfants vivent leurs rencontres singulières aux discours contemporains à travers leurs situations familiales, scolaires ou institutionnelles est une des perspectives de travail que se donne le laboratoire inter-disciplinaires du Cien, à Nancy. Nous laisserons passer dans la conversation entre les membres du laboratoire, ces émergences inédites surgissant entre enfants et adultes.
L'année 2022-23, a été rythmée par la préparation et la réalisation de la venue, de Myriam Chérel Nous envisageons cette année une nouvelle invitation, avec une conférence, à Metz, en janvier 2024.
Le laboratoire a continué ses rencontres, vers la préparation de la journée de l'enfant du mois de mars 2023, en commentant la lecture de différents textes préparatoires. Et nous avons amorcé le recueil de « brèves d'écoles », de « brèves familiales », ou de « brèves institutionnelles ». Nous essayons dans ce que nous racontons, ou dans ce que nous écoutons se raconter, d'entendre les petits bougés des corps, des paroles, les petites bévues, à partir desquels une surprise traverse ou surgit dans le monde du « savoir déjà-là». Un début de ce travail a été publié dans a-traits du cien n° 23. Nous aurons également à aiguiser nos vigilances, à ce qui peut traverser les nuits des enfants, rêves, cauchemars, rêveries, fantasmes... Avec quelles inventions d'inconscient sont-ils en prise dans ce qu'ils nous en racontent ? (Orientation de travail de l'institution de l'enfant pour 2024-2025).
Nous articulons de plus en plus les travaux des deux laboratoires du Cien, pour préparer nos réunions de laboratoires et les conférences, et en lien avec les activités de l'ACF. De 8 à 12 personnes : psychologues, psychologues scolaires, éducateurs spécialisés, arts thérapeutes, étudiants viennent de plus en plus régulièrement.
Responsable du laboratoire : Françoise Labridy, francoise.labridy@wanadoo.fr, 5, rue Bertrand Auerbach, 54 600 Villers-Les-Nancy, 06 79 84 05 72
Un mouvement inachevé
un texte de Françoise Labridy,La sexuation touche au corps vivant de l'enfant par le biais du langage , en même temps que
surgit le sujet qui s'en fera
responsable.
Vivre la sexuation, un mouvement inachevé
Laissons parler les enfants. Ils nous en apprendront bien plus que nous ne pourrions leur en dire sur la chose sexuelle, qui creuse en chaque petit d'homme, une faille et une énigme sur ce qu'est un corps vivant. Ce corps vivant qui, dans la surprise, éprouve ce qui se jaillit de lui, sans savoir ce qu'il en est. Ce qui se passe dans ce corps, ces secousses, ces saccades viennent percuter le corps parlant, Lacan a trouvé une formule pour le nommer : « un corps, ça se jouit ». C'est dans l'enfance que ça fait ébranlement ouvrant à des sensations « exquises » et douloureuses comme à des questionnements divers et multiples. Laisser parler dans l'enfant là où il est sujet en devenir, mais pas sans satisfaction et - sans qu'aucune autorité n'y fasse obstacle - fera qu'il se confrontera à un impossible à dire ; alors tentera de se nouer ce qu'il parle comme langue avec une chair en turbulence. C'est dans cet écart avec toute langue commune qu'il choisira et polira les mots de sa propre singularité de vivre. Ainsi, cet enfant si discret qui, le jour de la rentrée où se faisait la minute de silence concernant Samuel Paty, demanda à la psychologue qui le recevait si elle regardait les matchs de foot ? Ne questionnait-il pas ainsi en creux et dans le même temps, les modes de jouir des deux partenaires de la rencontre, confrontés à un monde devenu immonde ? Ce regard en s'extrayant fait sauter nos yeux de l'innommable.
Garçons et filles, filles et garçons, ont un corps qu'ils éprouvent à la fois à leurs dépens, comme à leur plus grande joie et puissance : quelque chose en eux exulte et les pousse à ceci ou cela, et dont ils ne sont pas les maîtres. Ça ex-siste pour eux d'abord, sans limites. Un couple arrive sur la pelouse de promenade. Le père a un chien en laisse, la mère porte la parka d'un enfant de 3-4 ans. Celui-ci, étourdi d'excitation, de cris et de rires, ne cesse pas de shooter dans le ballon mais en visant le chien. Il n'arrive pas à s'arrêter, il continue. Le père semble imperturbable, ne lâchant pas le chien, ni n'attrapant le ballon pour détourner l'enfant de son point d'excitation. La mère, d'une voix embarrassée : « Arrête, tu vas lui faire mal, arrête, tu es méchant. » L'enfant alors grimpe sur un muret et veut sauter pour descendre. Comment accueillir ce qui s'excite dans le corps des enfants, dès qu'ils explorent le monde qu'ils ont à habiter pour grandir ?
Comment enseignants, parents, psychologues... autres adultes, accompagnent-ils les enfants pour transformer, dériver, déplacer, border le « ne cesse pas des pulsions » par des actes et des paroles singulières qui en orienteront la visée et les perspectives ? Comment, dans chaque situation de vie, interviendra le pouvoir de nomination de la langue, pour faire frontière entre l'infini potentiel des pulsions et le fini d'une limite qui dira, ceci oui, et cela non, les filles c'est ceci, les garçons c'est cela, en introduisant le binaire de la langue qui ne peut que continuer à polariser les discours, puisqu'il en est ainsi de la structure signifiante ?
Françoise Labridy, septembre 2020